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Télévision

  • Docu-fiction: mensonge sans risque

    Docu fiction : comme son nom l’indique le procédé n’est déjà, pas clair clair dès le départ.

    Chèvre et chou. Vrai et faux...

    Documentaire est, en effet, un acte bien concret, une pièce à conviction quasiment, qui rend compte d’un évènement de façon objective.

    En fait, de la manière la plus vraie et plus complète qui soit.

    La fiction…eh bien c’est de la fiction.

    De l’invention.

    De l’imaginaire ‘’pur’’ et simple, qui permet toutes les licences, toutes les invraisemblances, tous les mensonges aussi.

    C’est la raison pour laquelle nos guides télévisuels en sont arrivés, depuis peu et tout doucettement, à ‘’combler les vides’’ laissés dans les documentaires par les lacunes du travail des informateurs, pour les combler par des scènes filmées et jouées par des artistes professionnels.

    On le voit, désormais, tout mais vraiment TOUT, est possible…et permis.

    Le mensonge, jusque là relativement affiché, est désormais bien présent. Et s'en flatte.

    En toute impunité cette fois.

    Si, auparavant, le label documentaire contraignait les réalisateurs à une rigueur sinon morale, ne rêvons pas, du moins humblement technique, les erreurs n’étaient pas légion ni très dommageables pour les évènements traités, voire pour les personnalités mises en lumière.

    Les personnages historiques, même récents, n’étaient pas trop maltraités, les documents et pièces utilisés pour transcrire les faits non plus.

    Le petit monde du cinéma et de la télévision était tenu par les actes d’historiens, quand bien même la fraude et la manipulation ont été de tout temps présentes.

    Néanmoins, l’on ne pouvait pas exagérément tordre le déroulement des évènements dont rend compte la mémoire sociale officielle ou officieuse.

    Désormais, on se lance.

    Dans un documentaire retraçant un ou des évènements, - aussi récents que brûlants si possible c’est plus vendeur -, s’il manque des pièces ou des témoignages, on ‘’comble’’ les vides.

    Avec, au mieux, des séquences reconstruites, au pire, carrément inventées.

    Eh oui, au pire.

    Car si un documentaire se doit de coller à la réalité retrouvée, un film de fiction, lui, est une œuvre totalement issue de l’imagination de l’auteur.

    De l’imagination, moindre mal, mais surtout de ses choix, de ses idées, de son caractère, quand ce n’est pas de ses lubies et de ses idées fixes, voire de ses haines et de ses amours particulières, sous-tendant ses comptes personnels à régler.

    Et le mensonge est là.

    Bien présent. Omniprésent car la mode du docu-fiction est désormais bien en selle.

    Après les films de ce genre retraçant la tragédie du 11/01, on a pu voir récemment chez nous, une de ces re-constructions sur l’attentat du Petit Clamart, puis celle sur la nuit tragique où plusieurs centaines d’Algériens ont été tués à Paris du temps de la guerre d’Algérie.

    Certes était présente l’obligation de coller à une histoire interdisant erreurs et invraisemblances, voire mensonges avérés et volontaires pour cause d’idées personnelles à faire passer.

    Et puis, des témoins directs des ‘’deux camps’’ étant encore vivants, il était, d’ailleurs, risqué de prendre trop de libertés avec les faits.

    Tout semble, jusqu’ici s’être passé sans trop de bobos.

    Néanmoins, la porte est désormais ouverte à tous les excès.

    Et ceci dans la plus large impunité.

    En effet, dans le cadre d’un film réellement historique, même retraçant des évènements récents, le réalisateur ne peut tout se permettre. Les documents sont là pour départager, y compris devant la justice, les adversaires de versions contradictoires.

    Par contre, dès lors qu’il s’agit d’un docu-fiction avéré, signalé et dûment présenté ainsi, plus de problèmes !

    Le docu-fiction autorise tous les dérapages, puisqu’il est établi qu’il s’agit d’un document dans lequel, par manque partiel d’éléments, l’auteur se permet, voire est contraint  de les inventer et s’en absout dès lors qu’il l’annonce ouvertement : la ‘’nécessité’’ de sainte mission d’information n’a pu être satisfaite que de cette manière!

    Fermez le ban! 

    Commode non ?

    On peut désormais triturer à sa guise autant les évènements passés que les présents.

    Ainsi verra-t-on prochainement un docu-fiction sur la secte du temple Solaire.

    Le sujet étant dramatique, tragique, on sent venir les dérives.

    Primo, l’évènement, les évènements relatifs à l’histoire, sont pour le moins aussi sujets à caution que sulfureux.

    D‘où, débats et controverses en perspective.

    ‘’Heureusement’, les éléments de fiction, étant ‘’obligatoires’’ du fait de trous dans les enquêtes, ils absolvent d’éventuelles intentions de nuire.

    La divine mission d’informer vous comprenez.

    Fastoche !

    Dans le même registre, on a même vu, récemment, la mode gagner le livre.

    Avec un roman d’un quidam, peu regardant quant l’objectivité due au public par les informateurs qu’ils soient journalistes ou romanciers, roman mettant en scène une malheureuse et virginale jeune fille de bonne famille, séduite et abandonnée par un membre d’une église cataloguée secte, on ne sait trop pourquoi, par les services de l’Etat, depuis, d'ailleurs, désavoués par l'ex-récent Premier Ministre qui, dans une circulaire de mai dernier, a renvoyé aux toiroirs ou aux poubelles de basse police, la fameuse liste des sectes françaises.

    Le but de la manœuvre du digne romancier était évident : discréditer la soi disant secte en question en évitant tout procès.

    Le roman étant de la fiction, l'impunité est désormais totale…

    Brave mais pas téméraire le bonhomme…

    La calomnie sans risque en somme.

    On voit le mensonge, on pèse le danger.

    Vous en avez après votre ex, votre percepteur, votre crémière, votre garagiste ou votre concierge ?

    Pas de problème : pour peu que vous vous en sentiez, et en ayiez les moyens, vous pondez un roman, ou un docu-fiction, même à compte d’auteur, et vous diffusez votre version des faits.

    On peut, désormais, écrire ou filmer n’importe quoi dans la mesure ou la chose est présentée comme de la fiction ou du docu-fiction.

    Ce qui est plus pervers encore car auréolant le produit de la si belle notion de DOCUMENTAIRE, laquelle donne à l’ensemble son semblant de véracité sinon ses lettres de noblesse !

    On est bien parti pour une longue longue série d’empoignades par docu-fiction interposés.

    Car il faut bien se rendre compte que vont fleurir pas mal de machins de la même eau, qui auront à rendre des comptes non pas à la justice qui ne peut rien contre les inventions pures, mais aux opposants aux thèses exposées, qui n’auront  eux, d’autre ressource que de rétablir la vérité, ‘’leur’’ vérité, de la même manière que ceux qui auront tiré les premiers.

    Bel exemple de perversion totale de l’information à laquelle la télévision, le meilleur medium pour ce nouveau genre ‘’d’information’’, nous avait déjà sinon habitués, du moins bien préparés.

    Dans les meilleurs mensonges disait La Rochefoucault, - tiens encore lui -, il y doit y avoir toujours un peu de vérité.

    Ca rappelle le fameux pâté à l’alouette vendu durant la guerre de 39-45, pâté qui portait la mention, Viande d’alouette et de cheval.

    Une autre mention était, hélas, omise sur les boîtes. Celle qui aurait consisté à mentionner qu’en fait, la proportion était de un cheval pour…une alouette…

    Allez, ce n’est pas demain qu’on va trouver la vérité dans l’information écrite.

    Et encore moins télévisée.