Giuliana Sgrena libérée, l'a été au prix des souffrances affreusement connues - chaque fois individuelles, toutes les fois identiques - de la prison, des humiliations, de l'angoisse vécue seconde après seconde.
Au prix aussi, hélas, de la vie de NIcola Calipari, un des deux agent des services secrets touchés en la protégeant contre le déluge de balles américaines qui s'est abattu sur leur véhicule...
Lorsque nous avons appris la nouvelle, nous nous sommes dit, méchamment et cyniquement nous l'avouons:''Il Manifesto? Pour les Américains qui haïssaient alors les communistes italiens et leurs journaux, la guerre froide n'a jamais cessé. A part qu'elle est nettement plus chaude.''
Curieux pour la plus puissante et la mieux renseignée armée du monde, de ne pas savoir qui se trouvait dans la voiture mitraillée sur la route de l'aéroport de Bagdad. Voire, de ne pas faire de sommations d'usage, de n'avoir pas encore mis au point de dispositif ad hoc pour stopper les bagnoles-projectiles possibles.
Oh! Notre remarque n'était, après tout qu'une question de journaliste non? Qui se doit d'envisager le pire dans un système qui cache tout ce qu'il faut savoir.
Eh bien, ce matin ce fut pire encore: le compagnon de Giuliena Sgrena, Pier Scolari, son compagnon, aurait été plus loin. Une radio a rapporté non pas une question qu'il aurait posée mais une affirmation:''Giuliena savait des choses qu'elle ne devait pas dire. On voulait la faire taire!'' Les communistes ne sont plus à craindre. On a connu ce genre de raisonnements dans l'Argentine des généraux: tous ceux qui ne sont pas avec nous sont tous contre nous.
Faire taire comme çà???
Ben oui non?
Quand on est le plus fort, pourquoi s'embêter? Pourquoi finasser? Et puis une bonne femme en plus. D'aileurs on ne se pose même pas la question.
Le pouvoir rend fou dit-on. Et le pouvoir absolu rend fou absolument.
Plus bêtes que méchants?
Faux: les ''bêtes'' ne le sont pas lorsqu'il s'agit de leurs intérêts.
Explication? Signification?
Le terrorisme d'où qu'il vienne, a-t-il besoin d'explication? De signification?
Dans un monde qui ne cesse de reculer les limites de la folie, de la cruauté, du mensonge, il va devenir de plus en plus difficile de trouver de nouveaux superlatifs. Au-delà de l'horreur, va-t-on dire super-horreur, méga-horreur, giga-horreur? Au fait! Qui c'est qui a inventé Superman?
Après çà, ou ira-t-on ma bonne dame?
Mais on y est depuis que le monde existe voyons. A ceci près qu'on augmente la dose. Petit à petit. De manière à habituer les humains à l'inhumain. Et çà marche.
Comme disait mon papa, en fait comme bien des humains disent:''On sait pas où on va mais et y va tout droit.''
Et de plus en plus vite.
L'on aurait pu s'en rendre compte depuis belle lurette: le monde n'est fait que de nations qui veulent faire prédominer leurs propres intérêts aux dépens de ceux des autres. Les décideurs, les chefs de tout poil se jaugent à la mesure de leurs armées, de leur argent, de leur puissance.
Les conventions de Genève c'est bon pour la ''Vieille Europe''. Celle des convenances, du clavecin et du menuet.
Dans le business, les sentiments ne sont que du temps perdu.
Une super-puissance n'a aucune raison de se gêner. Il lui suffit d'inventer les règles, ses règles, et de les mettre en oeuvre à sa manière: la loi du plus fort. Et Bible à la main c'est encore mieux.
C'est tout.
Une enquête dira - mais qui enquêtera sur l'enquête, voire à l'enquête sur l'enquête sur l'enquête - qui seront les responsables. Et, probablement, un ou des lampistes paieront. Comme à la prison d'Abou Grahib. On le sait: les dérapages sont toujours le fait des exécutants, pas des décideurs qui ne sauraientêtre suspectés, inquiétés.
Et peut-être, grondera-t-on aussi quelques troufions qui, pour se donner du coeur à l'ouvrage, se passent, dans leurs armored vehicles, du heavy metal en boucle à s'éclater les tympans.
Enfin on conclura, grosso modo à ce qui a déja été dit: une suite de lamentables, de regrettables erreurs. Avec excuses et, peut-être mais pas sûr, indemnités à l'appui. Et, pourquoi pas, des vacances gratuites à Disneyland.
Et l'on continuera à dire à travers la presse toute dévouée au pouvoir, de dire...bof, de dire tout ce qu'on dit, ce qu'elle dit, à sa manière, pour ses intérêts aussi, parce qu'encore une fois le business c'est le business, le fric c'est le fric et il faut bien vivre non?
Vrai, pas vrai? Comment savoir, en fin de compte dans des systèmes, dans un Système qui a fait du secret, et, au mieux de l'approximatif et au pire du mensonge, une manière, la meilleure, de gouverner?
Allez. On va se payer un big Mac et un bon Coke light. Y a que çà de vrai.