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Fête de la Musique? Silence...

Or donc, la fête de la Musique battait son plein ces jours-ci.

Bonne et belle initiative de cher Jack que les Français apprécient. Moins que lui-même il est vrai.

C'était la fête donc. Sur commande eh oui, comme la fête des Mères, des Pères, des Secrétaires, des immeubles, des toutous à sa mémère et des plombiers zingueurs pourquoi pas...Ainsi, on s'aime beaucoup une fois par an. Commode: ça évite de le faire tous les jours.

Fort bien.

Mais, rabat-joie comme nous le sommes, il nous faut bien avouer que si la musique en question, ne nous a pas toujours plu, mais tous les goûts sont dans la Nature, l’initiative nous chagrine un tantinet.

On s’explique.

 

D’abord, précision utile, ici, nous avons tous des goûts sinon identiques, du moins dans les mêmes gammes. Disons, modestement, assez culturelles. Mélomanes mais pas exégètes.

Notre éventail va de notre très cher et très regretté ‘’Au clair de la Lune’’ jusqu’au ‘’Sous-marin jaune’’ (et pas vert en français dans le texte), en passant par tous les possibles Beethoven, Mozart, Haendel, Haydn habituels, bref, les ‘’grands’’ classiques, mais aussi Gershwin, Cole Porter et les non moins ‘’grands’’ classiques modernes US, dont Grofe (peu connu et c’est dommage).

Sans oublier, évidemment vu notre antiquité, tous les chanteurs des années 30 à 90 (bel éclectisme), mais aussi les actuels genre Catherine Lara (le numéro 9 du CD Aral est splendide) sans oublier pas mal d’incursions dans les coulisses du bel canto bien tempéré.

Ceci pour dire que la musique on aime, mais pas le bruit, si vous voyez ce que l’on sous entend malignement.

DEUX PEINTRES DEUX MUSIQUES

Pourquoi notre désenchantement voire notre ire alors ?

Quand j’étais tout gamin, pour refaire la façade de la maison familiale, mon papa avait embauché deux peintres italiens, un jeune, l’autre son oncle, nettement plus âgé. Le savoir faire certes, mais surtout la faconde, la gentillesse et la rigolade garanties, ourlées de chansons interprétées à pleine voix à réveiller tous les coqs d’alentour vu que pas feignants, nos peintres embauchaient vers les six heures du matin.

Leurs chansons m’émerveillaient. Celles du jeune reprenaient, avec un timbre de clairon de cavalerie, tous les airs du répertoire : Rossini, Verdi, bref, tous les opéras mais, l’exploit, tous les rôles, féminins autant que masculins. Trois octaves c’est tout de même pas mal. Et notre Caruso mettait un point d’honneur à faire aussi vrai que vrai. Il imitait au mieux, autant les plus grands ténors que les plus vibrants sopranos.

Par contre, le tonton, d’une bonne trentaine d’années plus âgé, se contentait, lui, de ne chanter ‘’que’’ des airs de sa jeunesse en Calabre. Des chansonnettes toutes simples, qui parlaient de jolies filles, de beaux gars qui les courtisaient, de sècheresses, de service militaire, de mariages, de dangers, de dur labeur, de drames aussi quand le fermier de père n’appréciait qu’à moitié les manquements à l’honneur, supposés d’ailleurs, de leur progéniture.

En chantant il racontait la vie de son village. Il la racontait à tout le quartier car il poussait l’urbanité vraie, jusqu’à traduire bien haut et en français ce que sa vie lui avait appris dans sa langue natale.

Avec le temps, j’ai fini par comprendre l’évolution de la société qui se manifestait ainsi devant moi, mais de manière si infime que j’ai mis cinquante ans à en saisir les implications profondes.

Mon peintre de soixante et quelques années lui, chantait comme il vivait. En fait, il vivait en chantant. Le chant faisait partie de sa vie. De son naturel. Et du naturel de tous ses semblables puisqu’alors, tout le monde vivait et faisait ainsi. Le chant, comme les larmes, c’était le quotidien. Et chacun créait un petit chef d’œuvre à sa manière en se racontant.

Par contre, son copain trentenaire lui, était déjà d’une autre génération. Il chantait les belles choses de son temps mais, en fait, il ne créait déjà plus. Il copiait les grands artistes, les stars de l’époque.

Il n’inventait plus.

Que voyons-nous aujourd’hui ?

Etes-vous accueilli au guichet de votre banque par une ingénue élégante et poudrée qui vous pousse un ‘’Bieeeenvenuuuue à notre chèèèr clieeeeent et non moins amiiiii ! roucoulé ou stridulé comme trilles de rossignol ?

Etes-vous reçu, à la caisse du supermarché par des ‘’Meeeerciiiii ! Meeerciiii mon chèèèèr seiugneeeur !!! repris en chœur par les hotesses des caisses voisines qui rivaliseraient de sourires aussi enjôleurs que reconnaissants ?

La somnolente fonctionnaire employée de la Caisse d’Epargne se réveille-t-elle à votre approche pour entonner un vibrant ‘’Saaaluuut à voooous, ô cliiiieent chéééériii !’’ ?

On rêve non ?

ECOUTEURS DANS LES OREILLES

Aujourd’hui, les peintres et les plombiers ne chantent plus. Ils sont venus, un temps, avec leurs poste à transistors. Au mieux, ou au pire, ils arrivent désormais avec leur baladeur mais, pour être seuls à en profiter, leurs écouteurs bien enfoncés dans leurs oreilles. La musique, la culture - enfin on suppose - c’est pour eux, pas pour vous.

Pire : ils s’amènent avec rien du tout, la tronche sombre, fermée ou de travers, et la facture déjà prête à la main.

Pour la musique ?

Eh bien il y a les vedettes, les CD et les 10 à 20 euros à payer, bien sûr. Et les interdits sur Internet sinon c’est la taule.

Pour le bruit, par contre, il y a pléthore.

Depuis la télé jusqu’aux canonnades irakiennes, en passant par les discours politiques prometteurs, le monde vit dans un bruit de fond insoutenable. Tellement qu’il nous empêche de nous entendre.

De toutes manières, inventer, terminé.

Il y a des spécialistes pour ça.

Certes, au détour des rues musicales, des talents se mettent en place.

Mais ils seront des chanteurs parmi d’autres. Des vedettes.

Dans notre monde, il y a les balayeurs, les comptables, les guichetiers, les vendeurs, les hôtesses de caisse, bref, la foule grouillante des tout ce qu’on veut, ou de tout ceux qu’on tolère et au-dessus de tout ça il y a les vedettes, les patrons aussi, et puis rien.

Les chanteurs, les vrais, c’est-à-dire les humains normaux, pour qui le chant n’était qu’une des multiples manifestations de la vie, de leur vie quotidienne, N,I NI, FINI.

C’est à de tout petit signes tels que ceux-ci que nous sentons bien que les choses changent, doivent changer,en un mot é-VO-LU-ER comme nous disent les crânes d’œufs.

EVOLUTION !

Le joli mot qui veut faire croire qu’en EVOLUANT, l’Humanité s’améliore.

Alors qu’un chien crevé ou un homme mort lui aussi évolue.

Vers la pourriture, la décomposition totale une fois que l’animal, ou l’homme, est mort.

Evolution ?

Dégradation, décomposition plutôt.

Alors ?

Qui donc nous rendra le goût, la pratique de la musique au quotidien ?

Ben vous-mêmes….

Essayez donc de chanter, non, pas à l’hôtesse de caisse, au garagiste ou à votre percepteur, les sentiments que vous éprouvez à son égard…mais à votre âme sœur…pour commencer.

A la femme ou à l’homme de votre vie.

Non. Sans blague. Essayez.

C’est très rigolo.

Vous vous prendrez un peu moins au sérieux.

C’est déjà ça.

Puis essayez de faire partager votre invraisemblable manière de faire à ceux qui vous entourent.

Et faites passer le message.

Et donnez nous des nouvelles.

Des fois que le monde ne s’enfoncerait plus dans un silence de plus en plus opaque.

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