Ah les bonnes âmes !
Ah les braves gens !
Ah les admirables exemples !
Qui donc ?
Mais tous ces rigoureux censeurs bien sûr.
Tous ces vertueux moralistes que le numéro spécial de Courrier International nous sert pour nous apprendre que nous les Français, nous sommes des bons à rien, des racistes, des égoïstes, des hypocrites, des orgueilleux et que ce qui nous arrive est donc bien fait pour nous.
Nous l’avons cherché et nous avons trouvé.
Qui sème le vent récolte la tempête etc, etc.
D’ailleurs nous comprenons bien à la lecture de la presse internationale que la France est seule au monde à générer et entretenir ce racisme rampant ou affiché, cette morgue insolente qui nous fait imaginer que nous sommes les meilleurs au plan social alors que nous sommes les pires.
LES BEAUX EXEMPLES
Parce qu’en effet, les meilleurs c’est les autres.
Les Espagnols par exemple, avec leurs ratonnades de l’Espagne méridionale et la reconduite aux frontières sud des malheureux condamnés à mourir sur les barbelés de Ceuta ou à crever de soif au fin fond du Sahara.
Les Italiens, aussi, qui, entre autres lieux et dans l’île de Lampedusa, traitent ignoblement les immigrés venus de Tunisie.
Et les Anglais, tiens, dont, on sera charitables, nous n’évoquerons pas les conflits et émeutes inter ethniques rémanentes et moins encore le métro explosif dont les responsables étaient, comme c’est drôle, de purs ‘’Anglais musulmans remarquablement intégrés.’’
Et les Allemands, dont on n’exhumera pas le passé anti-handicapés, anti-sémite, voire anti-tout ce qui n’était pas aryen, u-na-ni-me à l’époque (1), et qui est, tout de même, ressorti subrepticement, en intégrant 80% des nazis et autres SS, et en tenant, encore aujourd’hui, dans un état servile, au chômage et sous payé, les Osties après la chute du mur, coupables d’avoir été 50 ans communistes.
Nous n’aurions garde d’oublier les Hollandais qui, eux aussi, oubliant leur passé colonial batave en Malaisie Indonésie, tiennent encore à l’écart les immigrés issus de leurs anciennes possessions.
ET LES ABORIGENES ?
Qui encore ?
Tiens, les Australiens eux-mêmes, qui nous donnent des leçons d’humanitarisme alors qu’ils en sont encore à traîner les pieds pour intégrer leurs aborigènes et les maintiennent dans une vie d’esclaves nécessiteux, en refusant en plus, au passage, d’accueillir quelques centaines de réfugiés écologiques des îles voisines, menacées de disparaître à cause de la montée du niveau des océans.
Jusqu’aux Japonais qui nous tancent en fronçant le sourcil. En escamotant, eux aussi, leurs bien vilaines saloperies de la dernière guerre.
Et, plus grave, en réhabilitant leurs ‘’héros’’ militaires de l’époque.
Cette époque où leurs principaux titres de gloire étaient les massacres , en masses, de civils Chinois, l’utilisation industrielle de chinoises et coréennes prostituées de force, au profit de la soldatesque japonaise, sans oublier leur atrocement fameuse unité 731 dans laquelle les gloires médicales japonaises expérimentaient sur les vivants les plus abominables moyens de destruction.(2)
Et en oubliant aussi le sort actuel fait aux immigrés coréens et philippins autorisés à vivre au Japon dans la mesure où ils ne le font qu’en tant que dociles domestiques.
Qui encore ?
Même les Suisses s’y mettent.
En n’évoquant surtout pas leurs draconiens contrôles forteresse aux frontières et les conditions non moins draconiennes, exigées pour mériter, goutte à goutte, le simple séjour sur le territoire et plus encore la naturalisation.
En oubliant également les salaires locaux qui, s’ils nous paraissent royaux eu égards aux nôtres, patinent lamentablement face à l’échelle des prix helvètes...
ET LES KURDES ?
La Turquie s’y est mise, aussi, évidemment.
En oubliant, elle encore, les mises à l’écart, au mieux, des Kurdes, et aux pires, les massacres dont ils ont fait l’objet.
Ainsi que les persécutions de toutes sortes qui perdurent, et, entre autres broutilles, les régimes spéciaux réservés aux dissidents, étudiants plus spécialement, dans les commissariats locaux.
Qui encore pour nous donner des leçons de morale politique et de morale tout court ?
Eh bien le Mexique voyons !
Qui ne parlera évidemment pas de son accord gouvernemental vertueux avec les USA pour l’exploitation à bas prix et dans des conditions misérables de la main d’œuvre locale.
Qui ne parlera pas non plus de cette condition, plus misérable encore, faite aux jeunes Mexicaines, assassinées en série dans de crapuleuses conditions, les autorités locales et régionales voire nationales ne cessant d’étouffer les velléités d’enquêtes officieuses menées par des associations humanitaires.
Et moins encore du sort fait aux Indiens, notamment du Chiapas pour ne citer que cette région.
Et les Américains ?
Oh ! Eh bien à quoi fallait-il attendre de la part du Wall Street Journal, porte parole des pilleurs de la planète ?
Rien d’autre qu’une condamnation bien sûr !
En oubliant, justement, la politique de très amicale coopération avec le Mexique, pour exploiter honteusement les ‘’chicanos’’ proches…lisez plus haut. Coopération tout aussi amicale avec tous les pays tiers où les enfants bossent pour trois grains de riz par jour. Juste de quoi les conserver en vie le temps de fabriquer une paire de Nike.
En oubliant encore le sort fait aux minorités noires malgré quelques rares éclairs de bon sens, tout de même électoraliste. On ne compte là bas qu’un seul sénateur de couleur.
Surprise tout de même, le New York Times évoque, opportunément, ce qu’aucun journal, même français, n’a, vertueusement encore, osé rappeler, savoir qu’en moyenne une ‘’famille d’immigrés de quatre personnes vivant dans un appartement subventionné par l’Etat, ne paie en général que quelques centaines d’euros de loyer, et peut percevoir jusqu’à 1000 euros d’aides diverses. Les chômeurs perçoivent davantage d’aide et les soins médicaux ainsi que l’école (vous savez celles qu’il faut brûler pour manifester son indignation) sont gratuits. ‘’
Ouf !
AH LES VERTUEUX !
Enfin, une info tout simplement vraie.
Quant aux journaux maghrébins, généralement, ils n’épiloguent guère.
Sauf deux journaux algériens qui ne se sont guère émus lors des répressions sauvages des émeutes kabyles, encore moins lors des séries de massacres de leurs propres frères de sang, et pas du tout à propos de la décision récente d’amnistier ceux qui ont aidé (mais, nuance, sans armes à la main !) les assassins…
Voili voilou !
Ah les braves gens !
Ah les bonnes âmes !
Vous savez ce qu’il disait notre collègue François de La Rochefoucauld à propos de ce genre de censeurs ?
‘’La vertu pour un malandrin, consiste à trouver un motif d’en accuser un autre.’’
Pour finir, ou presque, nous sera-t-il permis de rapporter ce qu’a dit M. Azouz Begag, Ministre chargé de l’ascension sociale, sans moyen de le faire d’ailleurs, à propos de la pauvreté et de l’exclusion évoquées comme seules causes des désordres ?
Il a dit, simplement : ‘’Pauvreté ? Exclusion ? Tous les incendiaires n’ont qu’à aller en Afrique, ou en Amérique du Sud (voire même en Amérique du Nord n.d.l.r), et ils verront ce qu’est la pauvreté et l’exclusion. Et en rentrant en France, ils pourront en embrasser le sol…’’
ET LES SMICARDS ?
Pauvreté ? Exclusion ?
J’ai une amie proche de ma famille qui, elle, trime dans une multinationale d’hôtellerie restauration appelée SODEXHO.
Il n’y a pas de syndicat sinon un de chefs qui ne s’occupe pas des petites gens.
Dans cette boîte, cette amie fait des ménages depuis dix ans pour…un SMIC. Avec comme seul horizon, la retraite à 60 ans avec 4.000 francs par mois. Au mieux.
Elle n’a encore jamais brûlé une seule voiture.
Et aucun journal ne pleure sur les personnes de cette catégorie qui existe à environ un million et demi d’exemplaires en France.
Il faut dire que le salaire moyen d’un journaliste est d’environ 10 à 12.000 francs par mois.
Donc, pas très concernés par le problème hein ?
Quant aux hommes politiques…
20 milliards d’euros pour les banlieues c’est bien. Il y en a besoin.
Mais les SMICARDS ne sont pas tous des immigrés.
Et on leur donne combien à eux?
Ce n’est pas du populisme ça.
C’est juste de l’arithmétique.
Sur les causes de l’exclusion, il est tout de même bon de relire ce qu’a écrit un collègue allemand, très clairvoyant et fort modéré dans ses termes.
Poli en tous cas et sachant se remettre en question.
Au lieu de participer à la vertueuse curée d’auto justification internationale.
Pas si mauvais que ça les Français ?
On n’a jamais dit ça. Mais le problème des vases communicants pays riches pays pauvres, sous produit en fait du problème riche pauvre, mérite mieux que cette recherche éternelle du bouc émissaire qui consiste en fait à sempiternellement rejeter la cause de ses propres malheurs sur la faute des autres.
Facile…
Et quant, en plus, on pare ce genre de révolte des attributs du dynamisme, du courage, de la force…
Tiens, pour terminer et je n’invente rien.
Avant-hier matin, samedi, en allant à pied chercher mon pain, un gamin de huit dix ans, qui passait à cinq six mètres, m’a regardé bien en face et m’a fait un doigt d’honneur.
Pourquoi ?
Comme ça !
Je n’ai rien dit bien sûr. Si j’avais eu le front de l’ouvrir, j’étais certain de la suite. A vingt contre un. Le courage quoi !
Pourquoi l’insulte ?
C’était sûrement pour exprimer la juste indignation de cet adorable et malheureux bambin, à l’égard de ma culpabilité dans la misérable condition dans laquelle est tenue sa famille.
Et aussi pour ce qui est de l’impossibilité de s’exprimer dans laquelle lui et tous les siens se trouvent et dans laquelle, enfin, et c’est évident, j’ai une grande part de très très lourde responsabilité.
(1) Hitler a été élu avec une majorité de plus de 60% des votants.
(2) Les ''spécialistes'', tout comme leurs homologues allemands experts dans tous les ''arts'' de destruction, ont été récyclés et réutilisés par les Américains, of course.